De X à Meta, dans la Silicon Valley, c’est visiblement à tribord qu’on chante le plus fort… et l’Europe commence à sérieusement s’inquiéter des attaques américaines sur sa politique et sa réglementation. Ce tournant a aussi de quoi nous inquiéter en tant que communicants, aussi est-ce notre devoir que d’analyser précisément ce qui se joue et d’en tirer les enseignements qui s’imposent avec éthique et discernement.
Directement inspiré par les nouvelles politiques de modération de X et par le principe des notes de communauté, Meta a choisi d’assouplir drastiquement sa gestion des contenus haineux sur Facebook, Instagram ou encore Threads.
Finie la collaboration avec les journalistes et autres fact-checkers professionnels, considérés comme trop biaisés par Mark Zuckerberg. Au-delà de ses déclarations d’amour pour « l’énergie masculine », le patron de Meta assume de « prôner une liberté d’expression sans censure », au risque de favoriser la désinformation et les vérités alternatives. Dans ce virage opportuniste et idéologique, indissociable du regain d’influence et de la pression opposée par Donald Trump sur les GAFAM, c’est désormais bien le sentiment majoritaire qui domine sur la réalité des faits.
D’ores et déjà, des premiers scénarios inquiétants circulent pour illustrer cette absence de modération, autant de contenus qu’on risque de voir éclore sur ces plateformes : déclarer que les personnes LGBTQIA+ sont des malades mentaux ou encore que l’action humaine n’est pour rien dans le réchauffement climatique qui, d’ailleurs, ne serait qu’une vaste supercherie complotiste…
Sans surprise, cette déclaration a fait réagir du côté des médias et des entreprises, inquiètes quant à leur présence sur ces réseaux, à leur brand safety ou à la poursuite de leurs partenariats. Ainsi, si la Ville de Paris ou encore l’Ecole Polytechnique font partie des nombreux acteurs à avoir quitté X, on voit de nombreux annonceurs manifester leur inquiétude concernant Meta, relaie Jean-Luc Chetrit, directeur général de l’Union des Marques, dans un article des Echos.
Alors faut-il, à l’instar du mouvement #HelloQuitteX, fuir massivement les réseaux de Meta ? Si certains estiment qu’il faut s’en désolidariser nettement, d’autres arguent qu’il faut y rester pour cultiver une forme de contrepouvoir…
Prudence reste de mise pour l’instant, car ces réseaux dominants jouent un rôle central dans les stratégies de communication des entreprises, avec une omniprésence qui rend difficile toute rupture complète.
Rares sont les alternatives suffisamment puissantes et crédibles pour rivaliser auprès des annonceurs ou des utilisateurs. Bien que des plateformes émergentes comme Bluesky se positionnent comme des solutions alternatives, leur impact réel pour les entreprises reste encore à démontrer.
Cela n’exonère pas les communicants de leurs responsabilités. Allier présence stratégique et éthique est la meilleure voie pour relever les défis de ces plateformes tout en contribuant à un écosystème numérique plus sain et durable.
En prolongement de cette réflexion, il sera intéressant de suivre la place que vont se tailler les modèles d’IA au cœur d’usages de search et d’échange réinventés, comme le montre Romain Brignier dans son dernier billet. Avec un modèle bien moins dépendant de la publicité et de nouveaux partenariats stratégiques avec les médias traditionnels comme Reuters ou Le Monde, OpenAI et consorts pourraient bien disqualifier une partie des investissements publicitaires sur Meta. Une hypothèse à tempérer à court terme puisque, pour le moment et malgré leur système d’abonnement, les IA n’ont pas de modèle économique pérenne et la question de leur intégration dans le marché publicitaire se pose toujours.
Chez WAT, nous prenons position pour de nouveaux imaginaires plus inclusifs, au cœur des dispositifs de marque corporate comme employeur. Ce mouvement intervient dans le cadre d’une remise en question des politiques RH d’inclusion et de diversité qui, bien qu’elle s’exprime davantage outre-Atlantique, interroge d’ores et déjà la sphère RH européenne sur son influence.
Si nous avons d’ores et déjà engagé notre responsabilité en vous invitant à quitter X, il est encore trop tôt pour engager des préconisations sur Meta, et nous resterons en veille active sur le sujet pour nous forger une opinion plus éclairée sur le sujet. Une affaire à suivre de très près dans les prochaines semaines.